Budget de l’Eta exercice 2010: « L’Assemblée nationale ne peut voter qu’un budget en équilibre », dixit Basile Ahossi

Publié le par MJPAC-ABT

ahossi_leon_basile.jpgPourquoi avoir augmenté les dépenses alors qu’en termes de réalisations, les recettes ont baissé ? Pourquoi la contribution financière de nos partenaires au développement dans un budget aussi sensible n’a pas été négociée au préalable (le cas du Danemark et d’autres qui s’annoncent, à différer leur appui budgétaire rendant ainsi déséquilibré le budget ?) Dans quel contexte, l’Assemblée nationale est-elle en mesure de voter un budget non équilibré en recettes et en dépenses ? Autant d’interrogations qui ont amené l’honorable Basile Ahossi du G13 a déclaré au cours de la conférence de presse qu’il a donnée samedi 26 décembre dernier au siège de son alliance politique que l’Assemblée nationale ne peut voter un budget non équilibré en recettes et en dépenses. Il était entouré pour la circonstance de Claude Djankaki et Assane Séïbou. Lire l’intégralité de son analyse sur le projet de budget général de l’Etat exercice 2010 avec un regard rétrospectif sur les évolutions ces 15 dernières années.
Note d’analyse sur le projet de Budget Général de l’Etat exercice 2010 avec un regard rétrospectif sur les évolutions ces 15 dernières années
Le budget général de l’Etat exercice 2010 est équilibré en recette et en dépense à la somme de 1.346 milliards contre 1.238 milliards en 2009. Eu égard au contexte d’une économie mondiale qui se remet timidement d’une récession économique causée par la crise financière internationale et à la gestion hasardeuse des fonds publics par le gouvernement : utilisation abusive et fantaisiste des moyens de l’Etat, les surfacturations comme c’est le cas dans le dossier CEN/SAD, la délivrance anarchique des ordres de paiement etc., l’on pourrait se poser trois questions :

1. Pourquoi avoir augmenté les dépenses alors qu’en termes de réalisation, les recettes ont baissé ?

2. Pourquoi la contribution financière de nos partenaires au développement dans un budget aussi sensible n’a pas été négociée au préalable (le cas du Danemark et d’autres qui s’annoncent, à différer leur appui budgétaire rendant ainsi déséquilibré le budget) ? Ce qui est une première au Bénin

3. Dans un tel contexte, l’Assemblée Nationale est-elle en mesure de voter un budget non équilibré en recette et en dépense ? A cette question, la réponse est sans équivoque ; l’Assemblée Nationale ne peut voter qu’un budget en équilibre conformément à l’article 110 de notre constitution.

Sur la question des charges, l’analyse révèle que sur les dépenses de qualité telles que la part de l’agriculture, seulement 4,1% a été retenu, une baisse, contre 4,7% en 2009, alors que la CEDEAO et l’UEMOA préconisent un seuil minimum de 10 à 15% dans le cadre de la relance de la production agricole pour une autosuffisance alimentaire. Ce qui prouve que ce Gouvernement n’a aucune ambition pour l’agriculture, si ce n’est des marchés d’achat d’outils douteux émaillés de corruption, pour les agriculteurs.

Dans le domaine de la Décentralisation, le gouvernement prévoit de n’apporter que 19 milliards pour l’ensemble des 77 communes soit en moyenne 246 753 000 alors qu’une ville comme Dakar au Sénégal est à plus de 10 Milliards. Mais au Bénin, une ville comme Cotonou doit se contenter d’environ 300 Millions.

Le paradoxe résulte du fait que pour les opérations de charme, malgré la sonnette d’alarme du FMI le gouvernement ne modifie pas son option pour l’augmentation de la masse salariale par la nomination pléthorique de Conseillers et Chargés de Missions, la création anarchique des Institutions de la République en dehors du cadre constitutionnel. Les dépenses de transfert qui sont des fonds non spécifiquement affectés et constituent une sorte de réserve pour des « financements à gré », passent à plus de 161 milliards soit 12 % du budget 2010 alors que ce type de dépenses n’a aucun impact sur l’activité économique car elles concernent généralement les subventions, les aides de solidarité, la distribution massive d’argent dans les meetings, les marches de soutien et de remerciement au Chef.

A l’analyse de l’importance des fonds consacrés à cette rubrique, si l’on devait qualifier ce budget en une seule phrase, on dirait que le budget 2010 est celui du soutien à la corruption : un budget de campagne électorale.

Les exemples ci-dessous montrent son opacité et son côté tabou qui valide la corruption et la mal gouvernance à travers, entre autres, l’alinéa 5 de l’article 246 nouveau de la loi des finances qui énumère : « à compter du 1er janvier 2010 les remboursements de Tva s’effectueront dans les 15 jours suivant la réception des demandes y relatives à concurrence de 75%. A la fin de leur instruction, les soldes validés pourront être remboursés aux entreprises bénéficiaires. En cas de surplus de remboursement, la TVA remboursée à tort est mise au rôle avec exigibilité immédiate. La liste des entreprises pouvant bénéficier de cette facilité est établie par la Direction Générale des Impôts et des Domaines au début de chaque année en fonction de leur situation fiscale ». Cette nouvelle disposition est une escalade dans la pression fiscale pour ruiner les opérateurs économiques déjà fragilisés par une situation économique délétère. Un tel projet, venant de ce Gouvernement qui a déjà prouvé par le passé tout son talent incroyable dans la gestion partisane ne peut soulever que des questions : pourquoi une telle liste et quels seront les critères de sélection des opérateurs économiques ? Nous avons encore en mémoire les ravages financiers causés au Trésor Public par les exonérations accordées sur les marchés de la CEN/SAD et les marchés de gré à gré à l’emporte pièce. L’accroissement des recettes fiscales est très important soit plus de 100 milliards par rapport au budget 2009 et de près de 214 milliards par rapport aux estimations de réalisation à fin décembre 2009. Les objectifs visés par l’instauration de nouvelles taxes en 2010 pourront-ils être atteints au regard des performances des régies financières et du contexte de la crise économique ? La pression fiscale faisant un bond quantitatif de 5 points (17% à 23%) sans tenir compte du ralentissement des activités économiques est inquiétante.

Pourquoi avoir instauré une redevance sur les communications GSM soit 15F la minute à l’appel international entrant et 2F la minute pour tous les appels en interne au mépris de la pauvreté criarde et de la détresse de nos populations. D’ailleurs que deviennent les conclusions de la fameuse Autorité transitoire ( sans fin ) de régulation ? Quelle évaluation de la situation a suscité cette nouvelle taxe ?

Ce faisant, les populations ne sont pas à l’abri d’une hausse de l’indice général des prix en 2010 par les effets du coût excessif des appels téléphoniques. Cette taxe est donc inique ; elle ne développe pas mais appauvrit les populations.

Eu égard à tout ce qui précède, il est désormais établi que les budgets confectionnés sous le régime du changement sont des budgets pour se bomber inutilement le torse et usurper un rang auquel l’on n’a pas droit au sein de l’UEMOA. Tous les budgets sous le Président Yayi Boni, manquent de réalisme dans la définition des ressources et violent par conséquent la règle de la pénultième. On a comme l’impression que le budget est élaboré en tenant compte de la somme des dépenses de prestige et non utilitaires pour créer des ressources fantaisistes difficilement recouvrables. Ce régime est donc celui qui a le plus dépouillé les contribuables en termes de fonds qu’il projette de recouvrer pour mieux financer les voyages, les fêtes, les concerts gratuits, les prières, les meetings et autres messages de soutiens.

Un tableau synoptique des ressources budgétaires et extra budgétaires sur les 15 dernières années montre la gloutonnerie du gouvernement du changement à avaler les milliards du contribuable sans se soucier de sa promesse de compte rendu consignée dans la charte du gouvernement. En 1995, le budget sous le Président SOGLO n’était que de 158 milliards contre 293 en 1996 ; sous KEREKOU 286 milliards en 1997, 320 milliards en 1998, 335 milliards en 1999, 386 milliards en 2000, 414 milliards en 2001, 475 milliards en 2002, 489 milliards en 2003, 528 milliards en 2004, 618 milliards en 2005, 614 milliards

En 2006 ; et sous le Président YAYI, 873 milliards en 2007, ce qui est déjà considérable, et ensuite brutalement, plus de 1000 milliards en 2008, 2009 et 2010.

Le budget de 2008 à lui seul dépasse l’ensemble des budgets du quinquennat du président SOGLO. Les réalisations du Président YAYI en 2008 ont-elles dépassé toutes les réalisations du quinquennat du Président SOGLO ?

Par rapport au Président KEREKOU, en dix ans le montant total des budgets s’élève à la somme de 4 144 milliards, alors que, en quatre ans de gestion, le montant total des budgets du Président YAYI BONI s’élève à 5 235 milliards sans les 04 emprunts obligataires d’un montant de 161,5 milliards.

C’est dire qu’en dix ans, KEREKOU n’aura dépensé que 79,15% du montant que YAYI BONI aura dépensé en quatre ans. Comparez-vous- mêmes les réalisations surtout que le Président KEREKOU avait déjà bouclé et démarré la plupart des grands projets de l’ère YAYI. Par la même occasion, en 3 ans, le gouvernement du changement a lancé 4 emprunts obligataires. Il faut dire que l’emprunt obligataire est une dette contractée auprès du public par l’Etat et remboursable à un taux fixe, ici de 6%.

Ce montant ne figure pas dans les Budgets du changement et il y procède à volonté depuis trois ans, au mépris de toute règle d’autorisation et de précaution. En 2007 par exemple, le Président YAYI Boni a lancé deux emprunts obligataires (la même année), l’un de 54 milliards géré par la CAA et l’autre de 30 milliards gérés par le trésor. En 2008, le même gouvernement a encore lancé un emprunt obligataire de 41 milliards géré par le trésor et en 2009 un emprunt obligataire de 36,5 milliards soit au total 161.5 milliards en trois ans contre un seul emprunt obligataire en 2005 de 5 milliards durant les deux quinquennats du Président KEREKOU et zéro emprunt obligataire sous le Président SOGLO. Le budget de 1346 milliards en 2010 contre le budget de 614 milliards en 2006, soit une hausse de plus de 100% en 5 ans dans le contexte qui est le nôtre est une insulte à l’intelligence. On pourrait nous opposer le cas du Congo par exemple,où le Budget affiche une hausse de près de 100% en 2010, passant de 1400 milliards à 2800 milliards pour une population de moins de 3 millions d’habitants. Mais dans ce cas, c’est parce que les revenus issus du pétrole sur les cinq dernières années sont de l’ordre de 11.000 milliards soit dix fois le budget du Bénin avec une croissance économique estimée à 12,1 % (croissance à deux chiffres) contre un peu plus de 5% en 2008 et 7% en 2009. Par contre au Bénin, la croissance à deux chiffres promise par le Président YAYI Boni, n’était que de 02 ,5% en 2009 contre 05% en 2008 avec une projection de 03% en 2010.

Au Bénin l’on tente de se cacher derrière la crise financière internationale pour camoufler les conséquences de la mal gouvernance qui ne permet pas au pays de renouer avec la croissance économique.

C’est à croire que la crise financière internationale n’est valable qu’au Bénin et non au Congo ou ailleurs.

La filière coton, notre principal produit d’exportation, affiche un désespoir puisque le taux du Budget consacré à l’agriculture, bien que déjà faible, a été réduit dans le Budget de 2010. Au même moment, les dépenses de prestige ont connu une poussée remarquable jusqu’à 161 MILLIARDS 753 MILLIONS soit 12% du Budget, c’est-à-dire trois fois plus que l’agriculture. On comprend aisément pourquoi la filière coton n’a pu être redressée malgré tous les tapages médiatiques.

CONCLUSION
La sagesse et les principes budgétaires en finance publique recommandent de ne pas bâtir des dépenses pérennes sur les ressources ponctuelles ou accidentelles. L’Assemblée Nationale devra prendre du recul face au refus de nous bailleurs et les incertitudes évoquées dans les recettes, jusqu’à s’assurer du niveau d’engagement réel de nos partenaires dans le soutien au budget.
Il nous paraît aussi important de revoir le degré de pression fiscale et le niveau des dépenses de prestige et de charme inutiles que comporte ce budget avant de le voter. Quant à l’attitude du gouvernement tout le monde est conscient qu’il n’a aucune considération aux autorisations de l’Assemblée Nationale et les principes de gestion en finances publiques. On se souvient encore, et cela continue, dans la gestion des fonds de l’escorte, des micro-crédits etc.
Et quand il respecte les principes dans certains cas, c’est pour glisser dans le trafic d’influence, la prévarication, la malversation, et la concussion, favorisant des détournements de milliards comme c’est le cas dans le dossier de la CEN-SAD, les machines agricoles, avec des scandales de surfacturation flagrante ; et des sociétés adjudicatrices créées pour la circonstance et dont les propriétaires réels relèvent du mystère. Alors que le rapport sur le dossier CEN-SAD est consciemment muet sur le niveau de responsabilité personnelle, conjointe ou solidaire, quelle ne fut la surprise des Béninoises et des Béninois lorsque le Chef de l’Etat affirme lui-même être responsable mais pas coupable. Depuis 2006, le gouvernement a promis de mettre fin aux OP. Mais après trois ans, il les a multipliés par trois. Prenons donc notre mal en patience et espérons que le meilleur budget qui remédie à toutes ces insuffisances, pour notre pays, sera voté après 2011.

Merci a toutes et a tous.

Journal 24 HEURES AU BENIN 28/12/09

Publié dans Politique nationale

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